Les négociations sur le nucléaire iranien, qui entrent dans leur dernière ligne droite, vont reprendre mardi à Vienne avec de nouvelles données. Tout d’abord la volonté américaine d’avancer sur la voie diplomatique, avec un geste de bonne volonté annoncé vendredi. Ensuite, l’urgence de trouver un accord avant que ce soit tard: en effet, les Iraniens ne sont plus qu’à quelques semaines de disposer de suffisamment d’uranium enrichi pour fabriquer une arme atomique. C’est ainsi que Washington a estimé lundi qu’une entente avec l’Iran était " en vue " mais devenait " urgente ".

Les négociateurs s’étaient quittés fin janvier en appelant à des " décisions politiques " après les " progrès " réalisés au cours du mois, qui avaient permis de sortir d’une longue impasse.

" Malgré les progrès ", les pourparlers " sont parvenus à un stade où une conclusion devient urgente ", a toutefois dit un porte-parole du département d’Etat américain à l’AFP. " Un accord qui réponde aux préoccupations-clés de toutes les parties est en vue, mais s’il n’est pas conclu dans les prochaines semaines, les avancées nucléaires de l’Iran rendront impossible notre retour " dans le texte de 2015, a-t-il ajouté. Selon les experts, les Iraniens ont tellement dérogé aux restrictions prévues par l’accord de 2015 qu’ils ne sont plus qu’à quelques semaines de disposer de suffisamment de matière fissile pour fabriquer une arme atomique.

Les Etats-Unis ont prévenu la semaine dernière qu’il ne restait plus que " très peu de semaines ", disant de nouveau souhaiter des négociations " directes " pour parvenir à un compromis dans cette " dernière ligne droite ". " Nous soutenons depuis longtemps qu’il serait plus productif de parler avec l’Iran de manière directe ", a souligné lundi le porte-parole de la diplomatie américaine. " Toutefois, les pourparlers vont demeurer indirects, à la demande de l’Iran. Les Etats-Unis n’ont participé à aucune réunion directe avec l’Iran ", a-t-il ajouté.

Vendredi, Washington avait fait un geste en annonçant le rétablissement des dérogations-clés protégeant de la menace des sanctions américaines les pays et entreprises étrangères impliqués dans des projets nucléaires civils non militaires. Cette décision doit permettre de " faciliter " des " discussions techniques " qui sont " nécessaires dans les dernières semaines des pourparlers ", a expliqué la diplomatie américaine, mais il " ne s’agit pas d’une concession à l’Iran ". Si les Américains souhaitent montrer leur " bonne volonté ", cela reste " insuffisant ", a réagi le chef de la diplomatie iranienne, Hossein Amir-Abdollahian.

De son côté, Téhéran a renvoyé la balle aux Américains. " Il est naturel que la République islamique d’Iran s’attende à ce que les décisions nécessaires soient prises de l’autre côté, en particulier à Washington ", a déclaré lundi le porte-parole du ministère des Affaires étrangères. " Nous espérons que la délégation américaine reviendra à Vienne avec des instructions claires sur la manière de remplir ses obligations sur la levée des sanctions ", a précisé Saïd Khatibzadeh, dans l’attente d' "engagements concrets ".

Le chancelier allemand Olaf Scholz a jugé " le moment décisif ", dans une interview au quotidien américain Washington Post mise en ligne lundi. " Nous avons adressé un message clair " à l’Iran: " c’est l’heure des décisions, pas de faire traîner le processus ", a-t-il dit. " Nous espérons qu’ils saisiront cette chance. "

Les pourparlers, qui ont débuté au printemps 2021, se déroulent entre les Iraniens et les parties restantes à l’accord (Allemagne, Chine, France, Royaume-Uni et Russie), avec la participation indirecte des Américains. Les Etats-Unis se sont retirés en 2018, sous la présidence de Donald Trump qui le jugeait insuffisant, de ce texte conclu trois ans plus tôt pour empêcher l’Iran de se doter de la bombe atomique. Ils ont rétabli dans la foulée leurs sanctions économiques; en riposte, la République islamique s’est affranchie des restrictions-clés à son programme nucléaire.

Les négociations visent à mettre en oeuvre un " retour mutuel " de Washington et Téhéran dans l’accord, défendu par l’actuel président américain Joe Biden. Mais le temps presse.

Avec AFP