La Russie pourrait engager le bras de fer géopolitique sur la question des hydrocarbures pour forcer la main des Européens, particulièrement dépendants du gaz russe, pour jetter l’oprobe sur l’union occidentale concernant les sanctions contre Moscou suite à l’invasion de l’Ukraine le 24 février dernier. Lundi, les États-Unis ont invité dans ce sens à regarder " sous un jour différent " d’éventuelles sanctions internationales sur le pétrole et le gaz russe, actant tout en les relativisant leurs divergences avec les Européens, et surtout les Allemands, sur ce sujet.

La Maison Blanche se montre très soucieuse de ne pas fissurer plus que nécessaire la cohésion quasiment parfaite montrée jusqu’ici par les Occidentaux en matière de sanctions économiques contre la Russie. La porte-parole de l’exécutif américain Jen Psaki a lourdement insisté, lors de sa conférence de presse quotidienne, sur " les circonstances très différentes " pour les Américains et les Européens en matière d’hydrocarbures russes – les premiers en importent peu, quand les seconds en sont, pour certains pays, très dépendants. Jen Psaki a précisé que Joe Biden n’avait " pas pris de décision à ce stade " concernant une action unilatérale des États-Unis eux-mêmes, au moment où des parlementaires de la majorité démocrate et de l’opposition républicaine préparent un projet d’embargo sur les importations de pétrole russe.

Dépendance allemande

La question des hydrocarbures russes a été, selon l’exécutif américain, évoquée lors d’une vidéoconférence lundi entre Joe Biden, le président français Emmanuel Macron, le chancelier allemand Olaf Scholz et le Premier ministre britannique Boris Johnson. Les quatre dirigeants sont " déterminés à continuer d’augmenter le coût " infligé à la Russie en réponse à l’invasion de l’Ukraine, selon un communiqué publié par la Maison Blanche. Le communiqué français évoque lui " leur détermination à renforcer les sanctions " à l’encontre de la Russie et du Bélarus, tandis que celui des Britanniques promet de " continuer à faire pression sur la Russie ".

Pourtant, Berlin demeure prudentes sur la question de futures sanctions, insistant surtout dans son communiqué sur les " nouvelles possibilités d’aide humanitaire pour l’Ukraine " qui ont également été discutées. Lundi, Olaf Scholz a fait savoir que les importations d’énergie fossile en provenance de Russie étaient " essentielles " pour la " vie quotidienne des citoyens " en Europe, et a assuré que l’approvisionnement du continent ne pouvait être assuré autrement à ce stade. L’Allemagne est en effet extrêmement dépendante. Elle a importé en 2021 19,4 milliards d’euros (21,5 milliards de dollars) de pétrole et de gaz naturel de Russie, ce qui représente 59 % de toutes les importations en provenance de ce pays.

Bien consciente d’être dans une position stratégique, en particulier grâce au gazoduc Nord Stream 2, la Russie avait déjà exercé ce levier de pression sur Berlin par le passé. Entre autres, Moscou avait décidé de couper le gaz en décembre 2021 pour marquer le coup suite à la nomination du nouveau chancelier allemand, Olaf Scholz.

Avec AFP