J’entends brûler midi et dans nos yeux soudain plus grands, l’écriture jaillit.*

Elle jaillit et se faufile le long des lignes depuis le Midi où je me trouve, face à la mer que survolent par moment, des goélands nonchalants.

De l’autre côté de la mer, il y a la mer. L’autre mer.

Il y aura toujours l’autre mer. Terre de marins phéniciens. Terre de Cadmos ceinte par la mer. L’autre mer.

Il y aura toujours l’autre mer. Il y aura toujours l’écriture. Parce que le toujours de l’écriture durera tant que durera le toujours de l’autre mer.

J’entends brûler midi et je retrouve sous mes yeux un lieu parmi tant de lieux. De ces lieux que l’on emporte avec soi, de lieu en lieu, telle une boussole qui nous guide. Et vers lesquels l’on éprouve parfois – sans savoir pourquoi – le besoin inexpliqué d’y retourner, ne serait-ce qu’en pensée.

Navigation à bord des felouques de la mémoire qui nous déboussole. Et nous ramène quelque part, là-bas. En cette terre familière.

Byblos. Arrivée à destination. Jeter l’ancre à Byblos. Se perdre dans les dédales.

Byblos ô mon amour s’habille de poussière. De cette poussière foulée par tant de peuples, envahisseurs, flibustiers, marins, commerçants, poètes, mécréants, croyants.

Poussière de murex aussi fertile que la terre de ce pays qu’ils ont tenté de rendre infertile. Et qui ont échoué. Et qui échoueront encore et encore. Parce qu’à Byblos, flotte, à qui sait en humer la senteur unique, le parfum de la fécondité niché au creux des pierres séculaires embrassées par la mer.

Féconde est la mer. Féconde est l’écriture. Féconde est la vie qui germe en ces lieux. Et qui germera toujours. Parce qu’il y aura toujours la mer. Et les pierres. Et l’écriture.


* Nadia Tuéni

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