Habitée (et même "torturée" comme elle dit), par une passion dévorante, Josette Menassa est une artiste polyvalente et une douce rebelle. Déjà depuis son enfance, elle adorait griffonner de très jolis dessins sur l’austère pupitre en bois de sa classe, au grand dam des religieuses de l’établissement qui n’avaient absolument pas perçu l’immense don de la petite fille. Aujourd’hui, aux États-Unis, elle est une artiste renommée et célébrée, partageant son temps entre la création de bijoux avec son mari Mark Patterson, la sculpture, la céramique et la peinture. Elle raconte son parcours à l’Agenda culturel.

Vous être une artiste multiple qui a toujours soif d’apprendre?

Absolument! J’ai étudié la gemmologie et le dessin en Californie, et quand mes parents m’ont sommée de rentrer au Liban, c’était pour moi un déchirement total. J’estimais que j’avais encore énormément à apprendre. Je suis dans une démarche permanente et perpétuelle de formation et d’apprentissage. Pendant la pandémie de Covid-19, j’ai appris à faire du crochet sur YouTube! Plus l’on apprend et plus l’on a à apprendre!

Mais vous avez fini par repartir pour New-York ? 

Oui, et j’ai commencé à travailler (illégalement!) dans l’attente d’un visa de séjour. Les choses se sont passées d’une façon très étrange: Je rencontre une dame dans un ascenseur qui me demande ce que je fais et qui, quand elle apprend que je dessine des bijoux, me donne le "tuyau" du free-lance, ainsi que des noms de sociétés qui sont susceptibles de me commander du travail. Et c’est exactement ainsi que les choses ont démarré! On me demandait des dessins très simples et c’était très bien payé. Cela m’a mis le pied à l’étrier.

Puis vous épousez Mark Patterson, lui-même créateur de bijoux…

Nous nous sommes rencontrés pendant nos études et nous nous sommes lancés dans la création de bijoux alors que nous n’avions même pas 25 ans! Ici aussi deux rencontres ont été décisives. Tout d’abord, un élève saoudien à mon mari qui a été notre premier client et puis un créateur d’origine suisse/allemande qui nous a mis au défi lors de la commande d’un collier qui devait finir en un mois. Mon mari rassemble les pierres et honore la commande dans les temps, contre toute logique, ce qui épate ce Monsieur. Il nous propose alors de venir travailler dans son atelier (nous n’avions pas encore notre atelier à nous) et il est devenu un être cher pour nous.

À quel moment décidez-vous de vous lancer dans la sculpture? 

Au moment où j’ai ressenti le fameux "blocage" qui arrive fatalement dans la vie d’un artiste. Un professeur m’avait mise en garde, mais je ne l’avais pas cru. "Vous êtes fantastique, m’avait-il dit, mais si vous travaillez trop, vous allez avoir un blocage." Mais à 26 ans on se croit invincible! Donc, ce fameux blocage arrive, après la naissance de mon deuxième enfant: plus d’inspiration, rien! Je décide alors de m’inscrire à un cours de céramique. Mon mari, comme toujours, m’encourage, et je me retrouve, encore une fois par hasard, dans l’un des meilleurs centres de sculpture. Et là c’est comme si j’avais trouvé le Graal! Plus de blocage et je n’ai plus jamais arrêté.

Vous sculptez surtout des têtes?

Oui, et là aussi, c’est une amie, noire américaine, professeur de littérature anglaise et mariée à un activiste très connu, qui a trouvé les têtes superbes et m’a encouragée: "Go for it, you’re good!" Quant à la céramique, je l’applique à ma vie quotidienne puisque cela fait trente ans que je n’ai acheté ni assiette, ni verre ni plats. Je les fabrique tous!

Zeina Saleh Kayali

Cet article a été originalement publié sur le site de l’Agenda culturel 

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