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Yasmine Ghata, lauréate du prix de la Closerie des lilas 2023 pour son septième roman, Le Testament du Prophète, revient sur les terres de son enfance, là où tout a commencé. Non seulement pour elle, mais pour toute une lignée d’écrivaines; sa mère, la renommée Vénus Khoury-Ghata, auréolée de ses distinctions poétiques, et feue sa tante, May Menassa, journaliste et auteure émérite du Liban. Yasmine Ghata a accordé un entretien de coeur à coeur à Ici Beyrouth.

La plume de Yasmine est imprégnée d’une transmission forte, presque génétique, avec ses ascendants littéraires. Au cœur de ses récits, il y a cette quête constante d’identité, de racines. La recherche de soi à travers les prouesses et les tragédies des ancêtres. Lorsqu’elle évoque la découverte inattendue de sa grand-mère paternelle, dernière calligraphe turque, dans une exposition au Louvre, le temps semble suspendu. Dans les méandres des arabesques et de la calligraphie ottomane, Yasmine voit un pont entre le passé, ce monde d’hommes où sa grand-mère avait su trouver sa place, et le présent, où la modernité s’est éteinte avec l’arrivée d’Atatürk.

Mais au-delà de la mémoire, son œuvre actuelle est un vibrant plaidoyer pour l’émancipation féminine. La romancière, de retour dans le berceau familial, est confrontée à un village qui, piégé dans les rets des coutumes ancestrales, refuse le vent du changement. L’écriture devient alors un exutoire, une échappatoire. Et dans cet affrontement avec le passé, l’ombre tutélaire de Khalil Gibran, ce mystique vénéré, plane, rappelant son œuvre phare, Le Prophète.

Avec une sérénité étonnante, Yasmine annonce vouloir s’extraire des entraves familiales pour son prochain ouvrage, évoquant la figure emblématique de Lino Ventura. La transition est amorcée, mais le souvenir du Testament du Prophète reste, tel un écho lointain, longtemps après avoir tourné la dernière page.