Le dossier des mégacentres n’a pas fini de faire des vagues. Incapable de s’entendre sur l’opportunité de leur mise sur pied à moins de trois mois des élections du 15 mai 2022, le Conseil des ministres a chargé une commission ministérielle, composée des différents partis représentés au gouvernement, de plancher sur ce dossier. Prochain rendez-vous: jeudi 10 mars.

Le Conseil des ministres s’est réuni vendredi au palais présidentiel de Baabda avec un ordre du jour comportant 26 points, dont certains relatifs aux élections législatives, notamment les mégacentres, ainsi que les élections municipales et des moukhtars, la sécurité alimentaire et le barrage de Bisri.

Les mégacentres

Les mégacentres, ces bureaux de vote géants qui permettent aux électeurs des régions éloignées d’élire leurs députés à partir de leur lieu de résidence, ont représenté le dossier chaud de la réunion du cabinet. Vu l’incapacité de s’entendre sur la possibilité de leur établissement, sur les plans logistique et financier, et comme le camp présidentiel s’y accroche, il a été finalement décidé de laisser une commission ministérielle plancher sur le dossier.

Pourtant, le ministère de l’Intérieur qui avait été chargé la semaine dernière d’établir une étude sur la question, avait conclu qu’il était incapable d’achever en moins de trois mois les préparatifs nécessaires pour la mise en place des mégacentres.

Les membres du gouvernement ont ainsi chargé une commission ad hoc d’ "étudier ce dossier en profondeur ". Elle est composée des ministres de l’Intérieur, de la Culture, de la Justice, des Finances, du Tourisme, des Télécommunications et de l’Éducation, comme l’a précisé le ministre de l’Information par intérim, Abbas Halabi, lors du point de presse qui a suivi la réunion du gouvernement.

Une décision plutôt surprenante, mais somme toute prévisible, car elle reflète l’acharnement du camp présidentiel à vouloir établir les mégacentres, alors même que ce projet risque d’entraîner un report des élections. En perte de vitesse au plan populaire et pratiquement isolé sur la scène électorale, le Courant patriotique libre, parti fondé par le président Michel Aoun, a besoin des mégacentres pour rassembler un plus grand nombre de voix. Le bloc parlementaire aouniste (Liban fort) avait appelé à plusieurs reprises le gouvernement à mettre en place les mégacentres pour le scrutin, estimant qu’il s’agissait " d’une des principales réformes nécessaires pour assurer l’égalité entre les électeurs, renforcer leur liberté, limiter l’impact de l’argent électoral et augmenter le taux de participation au scrutin ".

Le débat à ce sujet n’a pas été des plus calmes en Conseil des ministres d’autant qu’il a été décidé dans un premier temps de former une commission restreinte composée seulement des magistrats parmi les ministres.

Quoi qu’il en soit, leurs conclusions seront examinées durant la prochaine réunion du cabinet.

Les élections municipales et des moukhtars

Le Conseil des ministres a en outre reporté à l’an prochain les élections des conseils municipaux et des moukhtars, expliquant qu’elles n’auront pas lieu comme prévu en 2022, " faute de ressources financières et humaines ". La date proposée pour ces élections est le 31 mai 2023, mais " elle devra être soumise au Parlement, pour qu’il puisse donner son approbation ", précise-t-on dans le communiqué dont lecture a été donnée par M. Halabi.

Par ailleurs, le Premier ministre, Najib Mikati, a demandé que le gouvernement se penche sur la question de la sécurité alimentaire, à cause de l’impact probable qu’aurait la guerre entre la Russie et l’Ukraine sur le Liban, et " de prendre les mesures préventives nécessaires afin d’éviter une crise alimentaire dans le pays ". Une commission composée des ministres de l’Économie, de l’Industrie, de la Défense et de l’Agriculture, a été formée pour plancher sur ce dossier.

Le Liban et la guerre russo-ukrainienne

Un débat fiévreux s’est également déroulé concernant le communiqué du ministère des Affaires étrangères définissant la position du Liban par rapport à la guerre entre la Russie et l’Ukraine. Le débat sur la question a été déclenché à la suite d’une  intervention fiévreuse du ministre du Travail, Moustapha Bayram, critiquant le ministre des Affaires étrangères, Abdallah Bou Habib. M. Bayram lui a reproché d’avoir publié la position officielle du Liban sans avoir consulté, au préalable, ses collègues au sein du Conseil des ministres. Le Premier ministre, Najib Mikati, lui aurait répondu que " la position libanaise soumise à l’ONU ne ciblait pas la Russie nommément " et que le gouvernement libanais " refuse toute offensive internationale, quelle qu’elle soit, indépendamment de l’État concerné ".

La délégation du Trésor américain

M. Mikati a aussi exposé au cabinet la teneur de ses entretiens avec la délégation du Trésor américain au sujet de la lutte contre la corruption, la création du comité national anti-corruption, et l’engagement de l’État libanais à œuvrer pour l’exécution de ces réformes.

Il a par ailleurs annoncé que les subventions sociales seront distribuées à partir de la semaine prochaine, en remerciant le ministre de l’Économie, Amine Salam, " pour les efforts fournis par son ministère afin de mettre en œuvre ce programme, permettant de venir en aide aux familles les plus démunies ".