L’acharnement contre les manifestants se poursuit en Iran, alors que les autorités ont condamné trois nouveaux manifestants à mort. Selon l’IHR, une ONG basée à Oslo, au moins 1.500 personnes ont été arrêtées jusqu’à présent. L’ONU, de son côté, s’est insurgée contre les autorités de Téhéran qui infligent des peines de plus en plus dures et exige la libération immédiate des personnes arrêtées.

L’ONU a exigé la libération immédiate des milliers de personnes arrêtées pour avoir participé aux manifestations pacifiques et dénoncé des peines de plus en plus dures.

Le Haut-Commissariat aux droits de l’homme s’insurge contre " les autorités qui répondent à ces protestations sans précédent avec une dureté croissante ", a souligné Jeremy Laurence, porte-parole du Haut-Commissariat lors du briefing régulier de l’ONU à Genève.

Une Iranienne suivant des religieux islamiques dans une station de métro de la capitale Téhéran en scandant en farsi : " Bombes, chars et fusils, les mollahs doivent disparaître ! ". Un ecclésiastique se retourne alors pour la confronter en lui demandant : " Oh, je dois disparaître, ouais ? ", " Oui ! ", " maintenant ? ", " Oui ".

 

Dimanche, un tribunal révolutionnaire islamique de Téhéran a condamné à mort un manifestant anonyme jugé coupable de " faire la guerre à Dieu " et de " corruption sur terre ", " pour avoir prétendument endommagé des biens publics ", indique le Haut-Commissariat, rappelant que la peine de mort doit être réservée " aux crimes d’une extrême gravité impliquant la volonté de tuer ".

Trois nouveaux manifestants ont été condamnés à mort mercredi, alors que six personnes ont été tuées lors du mouvement de protestation contre la mort de Mahsa Amini qui entre mercredi dans son troisième mois.

La nuit de mardi à mercredi a connu des scènes de violence dans plusieurs villes du pays. Les manifestants marquaient le troisième anniversaire de la répression meurtrière de novembre 2019 liée à une hausse du prix du carburant.

Les autorités qualifient la plupart des manifestants d' "émeutiers ", instrumentalisés par des puissances étrangères, et ont mené au moins 15.000 arrestations, selon une ONG.

" On se battra! on mourra! on récupèrera l’Iran! ", chantaient des dizaines de manifestants autour d’un feu dans la nuit à Téhéran, selon une vidéo diffusée mercredi par le média en ligne 1500tasvir.

Une répression sanglante

Dans une autre vidéo largement partagée et vérifiée par l’AFP, des membres des forces de l’ordre semblent tirer depuis le quai d’un métro souterrain sur des personnes sur le quai d’en face, provoquant des cris et des chutes parmi les gens visés.

Au Kurdistan iranien (nord-ouest) d’où est originaire Mahsa Amini, " les forces du gouvernement ont ouvert le feu " sur des manifestants dans plusieurs villes, et trois d’entre eux ont été tués jusqu’ici, deux à Sanandaj et une à Kamyarana, a déclaré mardi soir à l’AFP l’ONG de défense des droits Hengaw, basée à Oslo.

Un appel à trois jours de mobilisation entre mardi et jeudi a été lancé pour commémorer le " Novembre sanglant " de 2019, lorsque des manifestations déclenchées par la hausse des prix du carburant avaient entraîné des violences meurtrières dans de nombreuses villes du pays.

Des postes de police avaient été attaqués, des magasins pillés, des banques et des stations-service incendiées.

Mardi, les magasins du Grand bazar de Téhéran ont fermé et des étudiants ont fait l’école buissonnière avant que de nombreuses personnes descendent dans la rue en soirée, scandant des slogans antirégime et essuyant des tirs de gaz lacrymogène, selon des vidéos postées en ligne.

Mais selon 1500tasvir, des familles des victimes de 2019 " ont été forcées d’annuler des cérémonies à la suite de menaces ou de pressions de la République islamique ".

Les autorités semblent avoir du mal à contenir le mouvement de protestation, lors duquel des femmes enlèvent leur voile, voire le brûlent, défiant les forces de sécurité dans les rues.

Au moins 326 manifestants ont été tués dans la répression du mouvement, selon un bilan établi samedi par Iran Human Rights (IHR), une ONG basée à Oslo.

Ce chiffre comprend au moins 123 personnes tuées depuis le 30 septembre dans la province du Sistan-Baloutchistan (sud-est), après des manifestations provoquées par le viol présumé d’une jeune fille par un policier.

Selon IHR, au moins 15.000 personnes ont été arrêtées, un chiffre démenti par Téhéran.

La crainte des exécutions de masse 

 

" Les manifestants n’ont pas accès à des avocats lors des interrogatoires, ils sont soumis à de la torture physique et psychologique pour qu’ils fassent de faux aveux, et sont condamnés sur la base de ces aveux par des tribunaux révolutionnaires ", a indiqué à l’AFP le directeur de IHR Mahmood Amiry-Moghaddam.

Il a encore dénoncé les condamnations à mort de manifestants, caractéristiques d’un " régime oppressif ", et dit craindre " des exécutions de masse ".

À l’étranger, le président français Emmanuel Macron a salué " le courage et la légitimité " de la " révolution des femmes et de la jeunesse iranienne ", après la réception de dissidentes le 11 novembre à l’Élysée, fustigée par Téhéran.

La France condamne " l’agressivité iranienne "

Emmanuel Macron a dénoncé mercredi une " agressivité croissante de l’Iran " à l’égard de la France par " des prises d’otage inadmissibles ", et appelé Téhéran à " revenir au calme et à l’esprit de coopération ".

S’exprimant lors d’une conférence de presse en clôture du sommet du G20 en Indonésie, le président français a également appelé l’Iran " au respect de la stabilité régionale ", évoquant " les bombardements ces derniers jours sur le sol irakien ". "La France a toujours respecté les dirigeants, le peuple iraniens. Nous avons toujours été dans une approche de discussion, de respect. Je pense que les choix faits ces derniers mois ne vont pas dans ce sens du côté de l’Iran. Donc j’appelle au retour au calme, au respect de la stabilité régionale, au respect aussi des ressortissants français ", a ajouté Emmanuel Macron.

Emmanuel Macron a salué " le courage et la légitimité " de " cette révolution des femmes et de la jeunesse iranienne ", après des semaines de manifestation, et après la réception de dissidentes vendredi 11 novembre à l’Élysée fustigée par Téhéran.

Avec AFP