La Russie a ordonné jeudi la fermeture du bureau local de la radio-télévision internationale allemande Deutsche Welle, en représailles à l’interdiction faite à la chaîne russe RT d’être diffusée en Allemagne, une première pour un grand média occidental dans l’histoire post-soviétique.

La décision de la Russie est " inacceptable ", a réagi jeudi la ministre allemande de la Culture et des Médias, Claudia Roth. Elle a souligné que RT en allemand diffusait " sans licence et n'(avait) pas demandé d’autorisation " à la différence de Deutsche Welle en Russie.

Cette fermeture annoncée par le ministère russe des Affaires étrangères intervient en pleine crise entre Moscou et les Occidentaux au sujet de l’Ukraine, qui redoute une invasion russe.

Ces trente dernières années, le Kremlin s’était gardé de s’en prendre aux médias étrangers, alors que le secteur médiatique russe a été, lui, mis au pas depuis que Vladimir Poutine a pris les commandes du pays en 2000.

Mais à mesure de l’aggravation des relations avec les Occidentaux, cette politique a évolué avec notamment l’expulsion d’une journaliste de la BBC et d’un reporter néerlandais en 2021.

Les " mesures de rétorsion " annoncées par Moscou jeudi impliquent la " fermeture du bureau " local de Deutsche Welle, le " retrait de l’accréditation de tous les employés " de ce bureau et " l’interruption de la diffusion " de ce média sur le territoire russe.

Selon Iouri Recheto, directeur de l’antenne de Deutsche Welle à Moscou, ce bureau local doit être fermé " d’ici vendredi matin ", conformémement à la notification officielle reçue de la part des autorités russes.

" Nous sommes sous le choc. Pour nous tous, cette nouvelle est très personnelle ", a-t-il déclaré dans un communiqué de DW.

Pour sa part, le président de DW, Peter Limbourg, a protesté dans un communiqué contre " cette réaction absurde ".

" Les mesures des autorités russes sont incompréhensibles et excessives ", a-t-il critiqué.

Le ministère russe des Affaires étrangères a également annoncé le lancement d’une procédure visant à reconnaître Deutsche Welle en tant " qu’agent de l’étranger ", qualificatif infamant et controversé déjà appliqué à plusieurs médias russes critiques du pouvoir.

Selon Moscou, des sanctions sont également prévues contre les " représentants de structures étatiques et publiques allemandes impliqués dans la restriction de la diffusion de RT ", chaîne qui promeut notamment la position du Kremlin à l’étranger.

Les autorités russes ont précisé que ces mesures relevaient d’une " première étape ", promettant une réponse supplémentaire " en temps utile ".

Quelques heures plus tôt, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, avait fustigé l’interdiction de diffusion faite par le régulateur allemand à RT comme une " atteinte à la liberté d’expression ".

Mercredi, Moscou avait également promis une punition à l’encontre des plateformes en ligne ayant " supprimé de manière arbitraire et injustifiée les comptes de la chaîne ", une référence apparente au géant américain YouTube, qui a suspendu le 16 décembre le compte en allemand de RT le jour de sa mise en service.

La diffusion par satellite de la chaîne en Allemagne avait été interrompue peu après.

Mercredi, le régulateur allemand ZAK a interdit la diffusion de RT Deutsch sur son site internet et sur une application mobile, arguant du fait que " l’autorisation nécessaire " n’a été " ni demandée ni accordée ".

Moscou estime que cette décision est en réalité " motivée par des considérations politiques ".

AFP