" Conséquences colossales et catastrophiques pour le monde entier ": Le président russe Vladimir Poutine n’a pas lésiné sur le vocabulaire utilisé et ne semblait pas  avoir encore digéré samedi les déclarations de Kiev concernant l’établissement d’une zone d’exclusion aérienne en Ukraine. La demande avait été formulée par le président ukrainien Volodymyr Zelensky envers l’Otan. L’Alliance atlantique a décliné la demande car elle la mettra en confrontation directe avec la Russie au risque que cela peut entraîner un recours aux armes nucléaires. Poutine a souligné samedi que la Russie considérerait comme cobelligérant tout pays tentant d’imposer une zone d’exclusion aérienne au-dessus de l’Ukraine. Il a même été plus loin en menaçant l’existence même de l’Ukraine en tant qu’Etat indépendant.
" Nous entendons qu’il serait nécessaire de mettre en place une zone d’exclusion aérienne au-dessus du territoire ukrainien. Mais il est impossible de faire cela depuis le territoire ukrainien, c’est seulement possible de le faire depuis le territoire de pays voisins ", a déclaré M. Poutine. Mais toute mesure en ce sens serait considérée par Moscou " comme une participation au conflit armé de tout pays " dont le territoire serait utilisé pour " créer une menace envers nos militaires ", a-t-il ajouté. Il a menacé de " conséquences colossales et catastrophiques non seulement pour l’Europe, mais pour le monde entier ", si une telle zone était créée. La Russie considérerait comme cobelligérant tout pays tentant de l’imposer. M. Poutine a également mis en garde contre une éventuelle perte par l’Ukraine de son statut d’Etat si les autorités ukrainiennes ne changent pas de politique. " Les autorités actuelles (ukrainiennes, ndlr) doivent comprendre que si elles continuent de faire ce qu’elles font, elles mettent en question l’avenir du statut d’Etat ukrainien. Et si cela se passe, elles en seront entièrement responsables ", a déclaré le maître du Kremlin.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a vivement critiqué vendredi le refus de l’Otan de mettre en place une zone d’exclusion aérienne en Ukraine pour neutraliser les capacités largement supérieures de la Russie dans les airs. Les pays occidentaux refusent d’accéder à cette requête, complexe à mettre en oeuvre, au motif que cela entraînerait un risque important de conflit direct avec la Russie, dont des militaires interviennent en Ukraine depuis le 24 février.

Après un crochet en Lettonie, Etat balte frontalier de la Russie, le chef d’état-major américain, le général Mark Milley, a souligné que si une telle zone était créée, " il faudrait alors qu’on y aille et qu’on combatte activement " les Russes, ce que l’Alliance atlantique ne veut pas faire.

Côté américain, le secrétaire d’État américain Antony Blinken s’est rendu samedi à un point de passage à la frontière polonaise avec l’Ukraine par laquelle des centaines de milliers de personnes fuient l’agression des forces russes. M. Blinken a visité un centre polonais qui accueille quelque 3.000 réfugiés et a déclaré que Washington s’apprêtait à débloquer 2,75 milliards de dollars (2,5 milliards d’euros) supplémentaires pour apporter un soutien aux gens fuyant l’Ukraine et aux pays qui les acceptent, pour faire face à la crise humanitaire.

Blinken s’est également entretenu avec son homologue ukrainien Dmytro Kouleba. " Le message du peuple ukrainien héroïque est simple: les Russes, rentrez chez vous (…) Poutine, laisse l’Ukraine tranquille. Tu ne gagneras pas la guerre ", a lancé M. Kouleba. Il a demandé des avions et des systèmes de défense aérienne, qualifiant de " signe de faiblesse " le refus par l’Otan de mettre en place une zone d’exclusion aérienne au-dessus de son pays.

M. Blinken fait une tournée des alliés clés en Europe qui subissent la pression de la guerre, afin de démontrer le soutien de Washington à leur sécurité et de renforcer l’unité occidentale contre Moscou. Après la Pologne, il se rendra en Moldavie, et dans les trois États baltes, particulièrement préoccupés par les actions de la Russie.

Dans le même temps, à Washington, des élus du Congrès promettaient de débloquer 10 milliards de dollars d’aide pour l’Ukraine, au cours d’un échange virtuel avec le président Zelensky.

" Nous encourageons à des négociations directes entre la Russie et l’Ukraine ", a de son côté dit le ministre chinois des Affaires étrangères Wang Yi dans une conversation téléphonique avec Antony Blinken. Le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell a d’ailleurs plaidé dans la presse espagnole pour que la Chine joue un rôle de médiateur.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a annoncé dimanche sur Twitter s’être entretenu une nouvelle fois au téléphone avec son homologue américain Joe Biden pour discuter de " questions de sécurité ", du " soutien financier pour l’Ukraine " et de " la poursuite des sanctions contre la Russie ".

Selon les autorités ukrainiennes, une troisième session de négociations avec les Russes se déroulera lundi. Mais les chances de parvenir à des progrès paraissent infimes, Vladimir Poutine ayant prévenu que le dialogue avec Kiev ne serait possible que si " toutes les exigences russes " étaient acceptées, notamment un statut " neutre et non nucléaire " pour l’Ukraine et sa " démilitarisation obligatoire ".

Avec AFP