Rompant un moratoire qu’elle exerçait depuis 2017, la Corée du Nord a tiré un missile balistique intercontinental qui a atteint la zone maritime japonaise. Malgré les résolutions de l’ONU qui interdisent à la Corée du Nord de procéder à des essais de missile balistique, celle-ci en a effectué plus d’une dizaine depuis le début de l’année, dans une démonstration de force adressée à son propre peuple juste avant l’anniversaire de la naissance de Kim Il Sung, fondateur du pays. Il s’agit cependant de la première fois depuis 2017 que le pays tire un missile intercontinental, susceptible d’atteindre les Etats-Unis. 

La Corée du Nord a tiré jeudi un missile balistique intercontinental (ICBM) qui est arrivé jusque dans la zone maritime économique exclusive du Japon, rompant un moratoire qu’elle observait depuis 2017 sur ce type d’essai d’arme.

Le président sud-coréen Moon Jae-in a confirmé, dans un communiqué, que le projectile lancé jeudi après-midi par Pyongyang en direction de la mer du Japon était un ICBM. Il s’agit " d’une rupture de la suspension des lancements de missiles balistiques intercontinentaux promise par le président Kim Jong Un à la communauté internationale ", a-t-il déploré.

L’armée sud-coréenne a indiqué avoir immédiatement riposté en tirant " des missiles depuis le sol, la mer et les airs " vers le large de ses côtes.

Le Premier ministre japonais, Fumio Kishida, a dénoncé " un acte scandaleux et impardonnable ". Le régime nord-coréen " menace la paix et la sécurité du Japon, de la région et de la communauté internationale ", a-t-il déclaré depuis Bruxelles, où il se trouve pour un sommet du G7.

Condamnant " avec force " le nouveau tir, la Maison blanche a assuré que les Etats-Unis prendraient " toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité du territoire américain, de la Corée du Sud et du Japon ".

Les résolutions de l’ONU interdisent à la Corée du Nord, frappée par de lourdes sanctions internationales pour ses programmes nucléaire et d’armement, de procéder à des essais de missiles balistiques. Ce qui n’a pas empêché Pyongyang de réaliser une dizaine de tests de ce type d’arme depuis le début de l’année.

Mais il ne s’agissait pas jusqu’à présent de missiles intercontinentaux, même si Washington et Séoul soupçonnent le régime nord-coréen d’avoir testé certains systèmes d’ICBM lors de ces lancements.

Pyongyang avait effectué trois lancements d’ICBM en 2017. L’engin alors testé, le Hwasong-15, était capable d’atteindre les Etats-Unis.

" Nos analyses indiquent que le missile balistique a volé pendant 71 minutes et est tombé vers 15H44 (06H44 GMT) dans la zone économique exclusive, dans la mer du Japon, à environ 150 km à l’ouest de la péninsule d’Oshima " dans l’île septentrionale de Hokkaido, a déclaré le numéro deux du ministère japonais de la Défense, Makoto Oniki.

" Étant donné que le missile balistique a cette fois-ci volé à une altitude de plus de 6.000 km, ce qui était beaucoup plus haut que l’ICBM Hwasong-15 qui a été lancé en novembre 2017, on pense que celui d’aujourd’hui est un nouvel ICBM ", a-t-il ajouté.

Beaucoup d’analystes s’attendaient à ce que Pyongyang, qui célèbrera le 15 avril le 110e anniversaire de la naissance de Kim Il Sung, fondateur du pays et grand-père de Kim Jong Un, se livre à une démonstration de force pour marquer cette fête, la plus importante du calendrier politique nord-coréen.

" Kim Jong Un considère très important de prouver qu’il est un dirigeant compétent avant le 110e anniversaire de Kim Il Sung, surtout à son propre peuple ", a expliqué Cheong Seong-chang, du Centre d’études nord-coréennes de l’Institut Sejong. Kim Jong Un a déclaré l’an dernier qu’améliorer les capacités militaires du pays était prioritaire pour le régime.

Priorité parmi les priorités: développer un ICBM capable de porter plusieurs ogives conventionnelles ou nucléaires suivant chacune une trajectoire indépendante, difficiles à intercepter par les systèmes antimissiles.

Les Etats-Unis et la Corée du Sud accusaient déjà le régime nord-coréen d’en avoir récemment testé certaines parties depuis le début 2022, sous couvert de ce qu’il a présenté comme des essais de lancement de satellites.

" Kim a probablement le sentiment que c’est le moment parfait pour développer des ICBM, et rappeler au monde avec insistance que le Nord, contrairement à l’Ukraine, est un pays doté de l’arme nucléaire ", a expliqué à l’AFP Ahn Chan-il, un analyste spécialisé dans la Corée du Nord.

Cet essai survient également alors que la Corée du Sud est en période de transition présidentielle, le chef de l’État sortant Moon Jae-in devant céder son fauteuil en mai au conservateur Yoon Suk-yeol, élu au début du mois et qui a promis d’adopter une ligne plus dure face aux provocations du Nord.

Avec AFP