Quatre ministres des Affaires étrangères arabes réunis par leur homologue israélien en plein désert du Néguev pour faire face au secrétaire d’Etat américain Antony Blinken. Le sujet: l’Iran et l’accord sur le nucléaire iranien. En somme, cette rencontre " historique " et " inédite " selon les Israéliens, a été consacré à transmettre à l’administration Biden l’opposition de l’Etat hébreu et des pays du Golfe à la réactivation de l’accord de 2015, piétiné par Trump en 2018. Petit détail, Blinken était le seul a appelé de ses voeux à ce que la récente normalisation entre Israël et certains pays arabes ne soit pas un substitut à une solution durable du conflit israélo-palestinien.

 

La réunion a eu lieu à Sde Boker, un kibboutz du désert du Néguev, où se trouve la tombe du fondateur d’Israël David Ben Gourion. (AFP)

 

Le secrétaire d’Etat américain Antony Blinken et ses homologues d’Israël et de quatre pays arabes ont conclu lundi une rencontre inédite sur le sol israélien visant à renforcer leur coopération, l’Etat hébreu parlant d’un message fort à l’Iran, un " ennemi commun ".

Réunis à Sde Boker, un kibboutz du désert du Néguev où repose la dépouille du fondateur d’Israël David Ben Gourion, les chefs de la diplomatie des Etats-Unis, d’Israël, d’Egypte, du Maroc, des Emirats arabes unis et de Bahreïn ont tous condamné l’attaque du groupe jihadiste Etat islamique dimanche à Hadera dans laquelle deux policiers dont une Franco-israélienne ont été tués.

Lors d’une conférence de presse commune, Israël a exprimé principalement ses craintes d’un possible retour à un accord international de 2015 encadrant le programme nucléaire de l’Iran auquel il s’oppose.

Les représentants des pays arabes et des Etats-Unis ont eux insisté sur l’importance de renforcer la coopération multilatérale et de résoudre le conflit israélo-palestinien.

" Nous écrivons ici l’histoire, bâtissons une nouvelle architecture basée sur le progrès, la technologie, la tolérance religieuse, la sécurité et le renseignement (…) Cela intimide, dissuade nos ennemis communs, en premier lieu l’Iran ", a déclaré le chef de la diplomatie israélienne, Yaïr Lapid.

Blinken insiste sur la question palestinienne

A son côté, M. Blinken a insisté sur les " gains " liés à la normalisation en 2020 entre Israël, les Emirats, Bahreïn et le Maroc, qui selon lui ne doivent pas faire oublier le conflit israélo-palestinien.

La normalisation n’est " pas un substitut " à des " progrès " entre Israéliens et Palestiniens, a-t-il dit, avant de quitter Israël pour le Maroc.

Le secrétaire d’Etat américain est arrivé en début de soirée à Rabat, où il a été accueilli par son homologue marocain Nasser Bourita, qu’il retrouvera mardi avant de s’entretenir avec le prince héritier d’Abou Dhabi et homme fort des Emirats, Mohammed ben Zayed Al-Nahyane.

M. Blinken achèvera sa tournée régionale mercredi par une brève étape en Algérie, dans un climat régional exacerbé par des tensions entre Alger et Rabat.

Dans ces deux capitales, les entretiens porteront sur la sécurité régionale et la lutte antiterroriste ainsi que l’impact économique de la guerre en Ukraine, selon des responsables américains.

La rencontre en Israël a tourné autour de la question de l’accord de 2015 censé empêcher Téhéran de se doter de la bombe atomique en échange de la levée des sanctions internationales, et que les Occidentaux veulent ressusciter, selon des sources diplomatiques.

Les Etats-Unis et l’Iran, engagés dans des pourparlers indirects, cherchent à relancer ce pacte qui s’est délité après le retrait unilatéral américain en 2018. Téhéran s’est, en représailles, progressivement affranchi des limites imposées à son programme nucléaire.

Israël, considéré par les experts comme la seule puissance nucléaire du Moyen-Orient, affirme craindre de voir l’Iran, son ennemi juré, profiter de l’accord pour se doter en douce de l’arme nucléaire. L’Iran a toujours démenti chercher à se doter d’une telle bombe.

" Tous les pays ici exceptés les Etats-Unis ont des réserves sur un accord nucléaire avec l’Iran et nous les avons rapprochés de notre position ", a affirmé à l’AFP sous couvert d’anonymat un responsable israélien, en marge des entretiens à Sde Boker.

Abdallah II à Ramallah

Les entretiens en Israël ont coïncidé avec un déplacement rare du roi jordanien Abdallah II à Ramallah en Cisjordanie, un territoire palestinien occupé par Israël depuis 1967, où il a rencontré le président Mahmoud Abbas.  La Jordanie a conclu la paix avec Israël en 1994, 15 ans après l’Egypte, premier pays arabe à signer un tel traité en 1979.  Cette visite a été vue comme une tentative d’apaiser les tensions.

 

L’an dernier, des heurts entre forces israéliennes et manifestants palestiniens pendant le ramadan, mois du jeûne musulman devant débuter en fin de semaine, avaient provoqué une guerre de 11 jours entre les islamistes palestiniens du Hamas et Israël.

" La région ne peut pas jouir de sécurité ou de stabilité sans une solution juste et globale à la question palestinienne ", a affirmé le roi jordanien au président Abbas, qui avait reçu M. Blinken dimanche, d’après l’agence officielle palestinienne Wafa.

Ces tractations diplomatiques ont eu lieu en outre au lendemain de l’attaque de Hadera.  " Notre présence ici est la meilleure réponse à cette attaque ", a déclaré le chef de la diplomatie marocaine Nasser Bourita, appelant à ce que fleurisse un " esprit du Néguev, celui de la coexistence ".

Avec AFP