La silhouette de son dos tourné, de ses larges épaules pendant qu’il prépare minutieusement leurs deux verres de gin. Le son feutré de ses orteils nus quand elle traverse sur la pointe des pieds le couloir long et tamisé. L’excitation au creux de son ventre quand elle sent qu’il la suit.

La brûlure de son souffle sur la peau fragile de son cou parfumé. La façon dont il lui enlève ses boucles d’oreilles dans une douceur hâtive avant l’amour. La façon dont elle lui sourit dans la provocation timide de ses gestes de femme enfant. La chaleur de ses doigts masculins qui se promènent sur sa peau moite, tout le long de sa colonne vertébrale, pendant qu’elle se repose entre ses bras, sur les draps en soie gris.

Le bruit sec de ses talons aiguilles quand elle quitte l’appartement, les joues en feu, le sourire aux lèvres, le corps en sueur.

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La chaleur étouffante des draps froissés quand elle se réveille en pleine nuit dans l’obscurité totale de la ville privée d’électricité. La canicule de l’été qui s’abat sur elle comme une sentence impitoyable. Le chaos des pensées noires qui pèse sur sa tempe. Le bruit assourdissant des battements de son cœur dans le silence lourd de l’appartement endormi. Le sommeil qui ne vient pas, qui ne vient plus, et les soucis du lendemain qui refusent de fermer l’œil.

Le rugissement du générateur qui s’allume soudain après minuit. La lumière aveuglante du réfrigérateur quand elle cherche de quoi assouvir sa fringale nocturne. Le plaisir de la crème glacée qui parfume son palais à la vanille.

La barbe piquante qu’elle caresse quand elle retourne au lit et le regarde dormir. Sa respiration rythmée à lui qui détonne avec le brouhaha de son cœur à elle.

Les klaxons en colère et les sirènes des ambulances empressées, dès les premières lueurs du matin. Le refoulement de la rage intérieure, les difficultés de la vie quotidienne, les tristes nouvelles. Le travail énorme du cerveau qui essaie de contenir les émotions. Les vibrations négatives des autres et leurs longues plaintes incessantes. Son corps qui essaie de réguler les réflexes de survie en appliquant les méthodes des yogis.

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Les petites victoires secrètes de chaque jour dans son combat contre soi pour soi.

Les sourires qu’elle distribue et qui émanent du profond de son être, quand tout autour d’elle crie à la déprime.

L’amour de soi, l’amour des autres.

Les jours où elle trébuche et se relève. Encore plus haut. Encore plus loin.

Cet univers qui s’écroule dans tous les sens, partout dans son monde. Le chaos qui s’installe dans chaque recoin de son pays. De sa vie. Et les pièces du puzzle qui recommencent à coller, un matin aléatoire sans préavis.

Son corps qui danse devant le miroir. Le reflet de la lueur qui brille au fond de ses yeux, car elle sait que demain apporte des surprises. Et son excitation d’enfant qui refait surface à cette idée.

La danse des vagues au bord du rivage, quand le soleil commence sa descente derrière l’horizon et que le crépuscule devient flamboyant. La caresse du sable chaud où s’enfoncent ses pieds nus, et la brise qui joue avec ses cheveux fauves.

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La vie est faite d’instantanés éphémères qui nous marquent au tréfonds de notre être.

L’intensité du bonheur fugace. Le chagrin qui naît du quotidien. Les miracles après le désespoir. L’âme qui touche le fond puis s’envole, dans un sursaut de dignité, de respect de soi.

Le pouvoir du moment présent qui efface la douleur d’hier, qui modère l’anticipation de demain. Les espaces entre les mots qui créent le silence. Ce silence qui neutralise les pensées quand le cerveau se résout à l’immobilisme. Et la liberté de l’âme qui brise ses chaînes pour retourner à son essence. À l’univers.

"Tous peuvent entendre mais seuls les êtres sensibles comprennent." Khalil Gibran

Fida Khalifé
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