Il y a, en cette saison automnale, comme une liesse dans l’arrière-pays niçois où l’on se hâte d’organiser, depuis quelques semaines, le week-end libanais. Saint-Paul-de-Vence, que l’on appelle ici "village perché" en raison de son implantation au sommet d’une colline provençale, est un lieu chargé d’histoire et de poésie. Le maire Jean-Pierre Camilla a aménagé sur la place du jeu de boules, sous les platanes, un espace dédié aux événements culturels libanais qui ont eu lieu le 1er et le 2 octobre, voulant comme un chef d’orchestre que tout soit bien mené. Entretien avec Jean-Pierre Camilla.

Fier d’appartenir à une terre à vocation artistique, le maire aime à souligner ce qui distingue Saint-Paul-de-Vence des autres communes:

"C’est un village médiéval cerné de remparts construits en 1538 par le roi François 1er. Ils offrent une vue exceptionnelle sur la campagne saint-pauloise avec ses vignobles, ses oliviers et la mer, ainsi que sur le Mercantour. Du fait de son implantation, c’est un beau village historique qui s’étend de la Méditerranée aux pré-Alpes. La richesse de son patrimoine architectural attire depuis bien longtemps des artistes, peintres, acteurs, sculpteurs… Certains y ont une maison comme Picasso, Modigliani, Jacques Prévert, Simone Signoret, Yves Montand et bien d’autres. La fondation d’art Maeght, qui a été créée en collaboration avec des artistes, accueille depuis 2018 la biennale internationale d’art contemporain. On peut y admirer les œuvres de Chagall, Braque, Giacometti et Miro…"

Il suffit de se laisser mener au détour des ruelles piétonnes pour découvrir les maisons provençales des XVIe et XVIIe siècles qui abritent des galeries d’art et des ateliers d’artisans, la fontaine datant de 1850 et le lavoir où l’on venait battre le linge. On est interpellé par les panneaux d’interprétation du patrimoine devant lesquels on s’arrête pour lire l’historique d’un site ou, à l’aide d’une puce NCF, pour accéder à des vidéos, interviews, poèmes. La Colombe d’or, lieu mythique dans la mémoire collective, fait songer au couple Signoret-Montand qui souvent s’y retrouvait. On grimpe vers l’église collégiale bâtie en 1666 et là, face au clocher, se dresse le donjon médiéval dans lequel s’est installée la mairie.

A Saint-Paul-de-Vence

Pourquoi à l’automne, saison peu touristique? "Vous savez, il y a chez nous du tourisme dix mois dans l’année. Il est vrai que l’afflux de visiteurs est très important en juillet-août, mais les gens continuent après les vacances d’été de venir passer une journée à Saint-Paul-de-Vence. Du début du carnaval, en février, jusqu’au 15 novembre, nous avons du monde, et l’automne est une saison douce. Et c’est encore mieux de mettre en place “les journées libanaises” en octobre parce que, justement, il y a moins de touristes."

Élu en 2020, le maire a planifié quantité de projets culturels qu’il souhaite réaliser: "L’idée m’est venue après avoir rencontré Geraldine Ghostine, présidente de l’association Mon Liban d’Azur, à Saint-Jean–Cap-Ferrat. J’ai beaucoup aimé l’événement en faveur du Liban. Nous avons donc décidé d’organiser ensemble à Saint-Paul-de-Vence une seconde édition pour promouvoir le Liban et récolter de l’argent au profit de l’Hôpital du Levant. Si, plus tard, nous arrivons, comme Saint-Jean, à créer des liens avec un village libanais, ce serait une bonne chose."

Tout heureux d’accueillir les talents libanais, Jean-Pierre Camilla nous fait part de la première journée riche en festivités "Le vernissage de l’artiste Georges Merheb est un premier pas pour faire connaître un artiste libanais dans un village artistique. Le dîner méditerranéen à quatre mains, concocté par le chef Youssef Akiki et le chef de la Vague Akhara Chay, où deux cultures se rejoignent, ne pouvait qu’être une réussite, animé par la chanteuse française Laurence du groupe Lollipop qui a interprété Fairouz et par le DJ Nicolas Abed de Nostalgie Côte d’Azur."

Les chefs Youssef Akiki et Akhara Chay

La résistance culturelle se poursuit par-delà les frontières. Présente sur la Côte d’Azur, la communauté libanaise, mais aussi les maralpins n’ont guère manqué ce bel événement parrainé par Alexandre Najjar dont la conférence suivie d’un débat a porté sur la francophonie et les relations franco-libanaises, samedi en fin d’après-midi. La plantation d’un cèdre du Liban, symbole de grandeur et d’immortalité, a scellé l’amitié entre les deux pays, dimanche matin, et a été suivie d’une séance de dédicaces d’Alexandre Najjar, ainsi que des ouvrages respectifs de Camille Tarazi "Vitrine de l’Orient" et de Virginie Broquet "Sur la route des ambassades de France". Pendant ce temps, Philippe Ghieu a animé pour les enfants un atelier de création de galets. Sur la place du jeu de boules, à l’entrée du village, le marché libanais exposait toutes sortes d’objets artisanaux d’Alice Eddé, des produits du terroir Kamel Farms, une variété de vins Ixsir et bien d’autres. Venus en grand nombre, les visiteurs ont pu déguster les spécialités arméniennes d’Aline Kamakian et libanaises de Nader Al Bacha, et assister au show-cooking du chef Youssef Akiki. AnchorAnchor