Terör örgütü" : c’est sans surprise que le ministre de l’Intérieur turc Süleyman Soylu accuse les " organisations terroristes " du PKK d’être responsables de l’attentat d’Istanbul qui a fait au moins 6 morts et 81 blessés. Les autorités turques ont arrêté au moins 22 personnes. Parmi eux, une femme de nationalité syrienne qui a reconnu les faits, toujours selon la police turque.

Des images de la police partagées par les médias turcs montrent une jeune femme en sweatshirt violet appréhendée dans un appartement. " La personne qui a déposé la bombe a été arrêtée ", a annoncé tôt lundi le ministre de l’Intérieur Süleyman Soylu. " D’après nos conclusions, l’organisation terroriste PKK est responsable " de l’attentat.

Il a ensuite confirmé l’arrestation de 46 autres suspects sans préciser les circonstances des interpellations, mais certaines au moins ont eu lieu au même endroit que celle de la jeune femme. La police affirme avoir découvert dans cet appartement une importante somme en euros et des pièces d’or dans un sac, ainsi qu’un pistolet et des cartouches.

 

Ekrem Imamoglu, le maire d’Istanbul, a confirmé que " l’état de nos blessés s’améliore " et a condamné " le terrorisme et les organisations terroristes " comme étant à l’origine de l’attentat de la rue Istiklal. (AFP)

 

Tragédie d’Istiklal

L’attentat, commis sur l’artère commerçante d’Istiklal, n’a pas été revendiqué. Il a fait six morts et 81 blessés dont la moitié restaient hospitalisés lundi. Parmi les victimes, toutes Turques, figurent une fille de 9 ans tuée avec son père et une adolescente de 15 ans, morte avec sa mère. " J’étais à 50-55 mètres de distance, il y a eu soudain un bruit d’explosion. J’ai vu trois ou quatre personnes à terre ", a raconté à l’AFP un témoin, Cemal Denizci, 57 ans.

Dès dimanche soir, le président Recep Tayyip Erdogan et son vice-président Fuat Oktay avaient désigné " une femme " comme la responsable de l’attentat. Le ministre de la Justice, Bekir Bozdag, avait rapporté qu’une " femme s’est assise sur un banc pendant 40 à 45 minutes et, une ou deux minutes après, il y a eu une explosion ".

La chaine de télévision privée NTV partage l’image tirée d’une caméra de surveillance sur Istiklal, montrant une jeune femme en pantalon de treillis, coiffée d’un ample foulard noir, qui s’enfuit en courant dans la foule, désignée comme la poseuse de bombe. Le ministre de l’Intérieur a accusé les forces kurdes des YPG, les Unités de défense du peuple, qui contrôlent la majeure partie du Nord-Est de la Syrie, d’être responsables de l’attentat. " Nous estimons que l’ordre de l’attentat a été donné de Kobané ", a-t-il ajouté.

 

Un attentat a visé dimanche le coeur battant d’Istanbul, principale ville et capitale économique de la Turquie, faisant au moins six morts et des dizaines de blessés. (AFP)
" Terroristes "

La ville de Kobané est restée célèbre pour la bataille qui, en 2015, a permis aux forces kurdes de repousser le groupe djihadiste État islamique. Elle est contrôlée par les Forces démocratiques syriennes (FDS) dont les YPG, alliées au PKK, sont une composante majeure. Pour Ankara, tous ces mouvements sont " terroristes ". L’attentat est survenu en plein après-midi dans la rue piétonne ultra-populaire d’Istiklal qu’arpentent les Stambouliotes et les touristes.

Fermé immédiatement après, l’accès à la rue a été de nouveau autorisé lundi matin, a constaté l’AFP. Tous les bancs ont été retirés et un tapis rouge couvre l’emplacement de l’explosion. Les passants viennent y déposer des œillets, rouges eux aussi. M. Erdogan avait le premier dénoncé un " vil attentat ", juste avant de s’envoler pour l’Indonésie et le sommet du G20, ajoutant que les auteurs seraient " punis ".

Le PKK, considéré comme une organisation terroriste par Ankara mais aussi par ses alliés occidentaux dont les États-Unis et l’Union européenne, est en lutte armée contre le gouvernement turc depuis le milieu des années 1980. Il a été souvent été rendu responsable par le passé d’attentats sanglants sur le sol turc.

 

Bras de fer

En décembre 2016, un double attentat près du stade de foot de Besiktas, à Istanbul (47 morts dont 39 policiers et 160 blessés) avait été revendiqué par les Faucons de la liberté du Kurdistan (TAK), groupe radical kurde proche du PKK. Le PKK est par ailleurs au cœur d’un bras de fer entre la Suède et la Turquie qui bloque depuis mai l’entrée de Stockholm, accusé de mansuétude envers le PKK, dans l’Otan. Dans ce contexte, La Turquie " rejette " les condoléances des États-Unis qui " soutiennent les terroristes " kurdes de Kobané, a indiqué lundi le ministre turc de l’Intérieur Süleyman Soylu.

Ankara a réclamé l’extradition de plusieurs de ses membres dans un memorandum d’accord signé en juin avec la Suède et la Finlande, autre pays nordique désireux de rejoindre l’Alliance atlantique. Après la visite à Ankara du Premier ministre suédois Ulf Kristersson, la semaine dernière, le Parlement suédois s’apprête à voter pour changer la Constitution afin de durcir sa législation anti-terroriste.

Le PKK est également régulièrement visé par des opérations militaires turques contre ses bases dans le Nord de l’Irak et la Syrie. Le mois dernier, de nombreuses accusations relayées par l’opposition et des observateurs turcs, démenties par les autorités, ont évoqué l’emploi d’armes chimiques par l’armée turque contre des combattants du PKK qui ont publié une liste de 17 noms, accompagnés de photos de personnes présentées comme des " martyrs " tués par des gaz toxiques.

Maxime Pluvinet avec AFP