La Jordanie accueille mardi le second volet de la conférence de Bagdad lancée à l’initiative de la France pour assainir la situation politique en Irak, en particulier, et la région en général. Un aréopage de dirigeants est attendu: à part Emmanuel Macron, le chef de la diplomatie de l’UE et des représentants des principaux acteurs du Moyen-Orient dont le ministre iranien des AE Hossein Amir-Abdollahian et l’émir du Qatar.

La conférence " Bagdad II " se tient sur les rives de la mer Morte, après une première édition dans la capitale irakienne en août 2021 à l’initiative d’Emmanuel Macron et de l’Irak.

" L’objet d’une telle réunion est de mettre autour de la table des voisins, des partenaires de l’Irak pour essayer d’avancer en favorisant le dialogue ", selon la présidence française.

Un pari difficile dans une région toujours instable. L’Iran réprime dans le sang une vague de manifestations contre le pouvoir, l’Irak sort tout juste d’un an de crise politique, la Syrie demeure un terrain d’affrontements entre puissances et le Liban est sans président, pour ne citer que quelques-unes des crises régionales.

Une membre des forces de sécurité kurdes syriennes Asayish monte la garde lors d’une manifestation condamnant les frappes turques sur les zones kurdes en Syrie. Nord-est de la Syrie le 6 décembre 2022. Delil SOULEIMAN / AFP

Selon l’Elysée, la rencontre vise à " apporter un soutien à la stabilité, la sécurité, la prospérité de l’Irak et traiter de l’ensemble de la région puisque l’Irak en est un pays pivot ".

" Ce sommet a de grandes ambitions, mais personne ne s’attend à des miracles ", estime Riad Kahwaji, directeur de l’Institut du Proche-Orient et du Golfe pour les analyses militaires (Inegma).

Il explique que la France joue un rôle crucial, en " gardant le fil du dialogue au nom des Occidentaux avec l’Iran, surtout que les négociations de Vienne sur le nucléaire (iranien) sont actuellement en difficulté ".

Compromis

Josep Borrell, le chef de la diplomatie de l’Union européenne qui coordonne ces pourparlers, sera présent en Jordanie, tout comme le ministre iranien des Affaires étrangères Hossein Amir-Abdollahian.

Ce dernier a estimé que ce sommet serait " une bonne opportunité " pour l’Iran " de finaliser " les négociations sur le nucléaire.

Le ministre iranien des Affaires étrangères Hossein Amir-Abdollahian lors d’une conférence de presse avec Josep Borell, haut représentant de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité. (Atta KENARE / AFP)

Son homologue saoudien Fayçal ben Farhane est attendu à la conférence, de même que l’émir du Qatar, cheikh Tamim ben Hamad Al-Thani.

Pour M. Kahwaji, analyste basé à Dubai, il faudra voir " quelle est la disposition de Téhéran, qui joue un rôle central dans les crises de la région, de l’Irak à la Syrie en passant par le Liban et le Yémen, à faire des compromis ".

Téhéran a accusé pour sa part plusieurs pays étrangers, dont son rival régional, l’Arabie saoudite, avec lequel les relations diplomatiques sont rompues depuis 2016, d’encourager le mouvement de contestation inédit en Iran, déclenché après la mort en détention d’une jeune Kurde.

" Nous sommes disposés à revenir à des relations normales et rouvrir les ambassades quand la partie saoudienne sera prête ", a assuré lundi M. Amir-Abdollahian.

Des femmes lèvent des drapeaux et des pancartes lors d’un rassemblement de partisans du cadre de coordination irakien à l’extérieur de la zone à Bagdad, le 12 août 2022. Ahmad Al-Rubaye / AFP

L’entrée en jeu de l’Iran dans le conflit ukrainien à travers la fourniture de drones à la Russie complique encore la situation, selon M. Kahwaji.

Problèmes communs

La conférence fera figure de test pour le Premier ministre irakien, Mohamed Chia al-Soudani, désigné en octobre après plus d’une année d’impasse politique et jugé plus proche de l’Iran que son prédécesseur.

" Le Premier ministre Soudani co-organise avec nous cette conférence. Donc, il y a une volonté de continuité de sa part qui est à relever ", souligne la présidence française.

Hamzeh Hadad, chercheur invité au Conseil européen pour les relations internationales (ECFR), estime que " les Irakiens et les non-Irakiens aimeraient voir la réunion déboucher sur un programme plus sérieux " qu’en 2021.

Le président français Emmanuel Macron visite le porte-avions Charles de Gaulle en mer Rouge pour le Noël avec les troupes. (AFP)

Le sommet doit en outre se pencher sur des problèmes communs, comme le réchauffement climatique et la sécurité alimentaire, ainsi que sur la coopération régionale en matière d’énergie.

Emmanuel Macron, qui s’est rendu lundi sur le porte-avions français Charles de Gaulle au large de l’Egypte pour la fête de Noël avec les troupes françaises, s’entretiendra également avec le roi de Jordanie Abdallah II, " allié dans la lutte contre le terrorisme ", selon Paris.

L’armée jordanienne s’est déployée en force depuis l’aéroport d’Amman jusqu’au centre de conférence de la mer Morte, à une cinquantaine de kilomètres à l’ouest de la capitale, où se tient la réunion.

Avec AFP