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À la croisée des cultures, Amin Maalouf, artisan littéraire de l’Orient et de l’Occident, vient de recevoir les clés de la vénérable Académie française. Succédant à Hélène Carrère d’Encausse, décédée en août dernier, son élection en tant que secrétaire perpétuel résonne comme un nouveau chapitre pour cette institution. Avec 24 voix en sa faveur, il a su se démarquer face à son ami écrivain, Jean-Christophe Rufin, qui en a recueilli 8.

​Ce 28 septembre, la Coupole de l’Académie française, témoin silencieux de la richesse et de la diversité du patrimoine littéraire français, a vu l’élection de l’écrivain franco-libanais Amin Maalouf au prestigieux poste de secrétaire perpétuel. Il succède à Hélène Carrère d’Encausse, décédée le 5 août dernier​.
La candidature d’Amin Maalouf, symbole de la capacité du monde littéraire à transcender les frontières et à ériger des ponts entre l’Orient et l’Occident, a été largement appréciée par les Immortels du Quai Conti. L’adhésion profonde de l’institution à son idéal de paix et de dialogue s’est manifestée par une victoire éclatante, remportée par 24 voix contre 8 face à son ami de longue date, Jean-Christophe Rufin.

La déclaration de candidature surprise de ce dernier, seulement trois jours avant le scrutin, avait jeté un bref voile d’incertitude sur cette élection. Dans une lettre élaborée adressée au doyen d’élection, Pierre Rosenberg, Rufin avait confié avoir réfléchi longuement avant de se décider, motivé par un désir sincère de servir " avec énergie, compétence et transparence ". Il exprimait alors le souhait que l’Académie dispose d’un véritable choix pour son avenir; choix dont l’auteur du Rocher de Tanios a finalement bénéficié.

Il est indéniable qu’Amin Maalouf est une figure emblématique du paysage littéraire contemporain. Depuis la parution de son essai visionnaire, Les Croisades vues par les Arabes, en 1983, il s’impose comme un auteur d’une grande érudition, capable de tisser des liens harmonieux entre les cultures et les appartenances. Il combat vigoureusement ce qu’il a décrit en 2011, lors de son discours de réception à l’Académie, comme le “mur de la détestation”, souhaitant abolir les préjugés et l’incompréhension qui divisent l’humanité.

La ministre de la Culture, Rima Abdul Malak, franco-libanaise elle aussi, a salué l’élection de Maalouf, le décrivant comme un “homme de fraternité, de dialogue, d’apaisement”. Elle a insisté sur l’importance symbolique de son élection pour tous les francophones du monde.

Le secrétaire perpétuel nouvellement élu n’aura pas à s’attarder sur la neuvième édition du Dictionnaire de l’Académie, presque achevée. Cependant, d’autres défis l’attendent, dont la gestion financière délicate de l’Académie et la nécessité de rénover le bâtiment historique, quai de Conti pour éviter tout risque d’incendie. Ajoutons à cela le défi d’attirer de nouveaux membres, plus jeunes et davantage de femmes, pour rafraîchir la composition de la “Compagnie”. Une mission qui n’est pas aisée, comme l’ont montré les récents échecs de candidats tels que Frédéric Beigbeder ou Benoît Duteurtre.

Dans une époque marquée par des crispations identitaires, le choix d’Amin Maalouf comme successeur d’Hélène Carrère d’Encausse, la “Tsarine”, offre une bouffée d’air frais et un nouvel espoir. C’est une invitation au dialogue, à la compréhension mutuelle et à l’ouverture d’esprit. L’Académie française, par cette décision, réaffirme sa vocation de préserver et de promouvoir la richesse et la diversité de la langue française, tout en jetant un pont vers l’avenir.