Cette publication m’est inspirée par les commentaires de certains d’entre vous, lecteurs de ma page; commentaires critiques aussi importants, à mes yeux, que ceux qui se présentent comme élogieux.
Vous dites: "pour moi, aucune thérapie n’a marché"; "j’ai déjà vu plusieurs praticiens sans résultat significatif ni durable"; "je suis découragé et n’y crois plus"…

Votre discours critique est important, d’abord parce qu’il n’est pas contestable: si vous ne ressentez aucun changement et continuez à souffrir, il est forcément juste de dire que la thérapie n’a pas opéré. Ce discours est important, aussi, parce qu’il est fréquent: beaucoup de mes patients sont venus me voir à l’issue de plusieurs tentatives thérapeutiques décevantes, et se trouvant dans un état de doute, légitime alors, envers la psychanalyse.

Qu’est-ce qui fait la différence entre la thérapie qui échoue et celle qui réussit – puisque les témoignages de tous ceux qui ont guéri ou changé de vie ne se contestent pas davantage?

Je pense trois facteurs de réponse majeurs. Le premier tient à la nature exacte de la thérapie, qui définit le cadre ou plus exactement la structure de travail dans laquelle s’inscrivent ces deux autres facteurs que sont le lien avec le thérapeute et la position du patient. De ces trois facteurs découle l’efficacité de la thérapie, sur une gamme allant du lumineusement révolutionnaire au vain, en passant par des formes mitigées ou inachevées.

L’offre thérapeutique est multiple

Dans la "sphère psy" actuelle, l’offre thérapeutique est multiple, et parfois incohérente. Je considère que toute thérapie rigoureuse dans la définition de son champ, comme dans la qualité de son fonctionnement, peut avoir son utilité. En revanche, les mélanges ne profitent jamais au patient. Il existe, par exemple, des thérapies se déclarant "d’inspiration analytique", ce qui n’a pas de sens, et conduit nécessairement à une certaine errance en termes de résultats. Un praticien est en position de psychanalyste ou ne l’est pas. Le travail thérapeutique est orienté par ce que l’on appelle le discours analytique, ou ne l’est pas. Que la cure ait lieu en face-à-face ou sur le divan, qu’elle soit brève ou longue, ne change rien à ce repère fondamental qu’est le discours analytique: celui qui vient mettre en fonction un psychanalyste digne de ce nom. Le discours analytique, dispositif de parole, spécifie la nature du lien de travail entre le psychanalyste et le patient, et organise la production du résultat.

Le lien thérapeutique, lien éminemment humain, requiert un psychanalyste se tenant dans une présence fiable, bienveillante, aimante même, et sachant diriger la cure avec exigence, précision, tact, subtilité, ouverture, patience, inventivité, ce qui ne se feint pas ni ne s’improvise. À ce propos, je vous invite à lire, sur cette page, l’article intitulé: "C’est un métier". La présence authentique du psychanalyste et son savoir (en aucun cas son pouvoir), la figure qu’il peut alors représenter pour son patient, suscitent et soutiennent le désir de parler de celui-ci. Dans la personne du psychanalyste, support humain mis en action par le dispositif analytique, réside, nous le voyons, un facteur décisif de succès ou d’échec. Dès lors, si vous pensez que votre tentative de thérapie a échoué, vous semble-t-il possible que vous n’ayez pas rencontré la bonne personne pour l’accueillir et la conduire? Comme dans le registre amoureux, un échec, voire une suite d’échecs sont certainement décourageants, mais n’annulent pas ce fait que l’amour existe et peut rendre heureux. De même, la bonne rencontre thérapeutique existe et peut assurément mener à ce changement intérieur appelant une vie meilleure; celle que j’ai désignée, tout au long de mon livre, comme "la vie augmentée".

La position du patient

Au sein du discours analytique, ce troisième facteur que nous avons appelé "la position du patient" se caractérise d’être celle d’un sujet désirant, désirant savoir, désirant guérir, et qui se met au travail. Aussi, dans le cas où vous avez le sentiment qu’aucune séquence de thérapie n’a constitué un progrès jusqu’ici, pensez-vous que vous étiez prêt à entrer dans le mouvement du véritable questionnement et du changement? Peut-être aviez-vous peur, peut-être étiez-vous impatient ou au contraire résigné, ou encore partagé, voire involontairement réfractaire? Si vous avez bougé aujourd’hui, si par exemple vous souffrez plus encore et avez pris la résolution de ne plus endurer cela à aucun prix, si, par ailleurs, vous avez gagné en lucidité, en responsabilité, en détermination, en tout ce qui vous approche du sujet animé du désir de savoir, il est certain que votre évolution viendra donner des chances nouvelles à une présente (re)tentative de travail thérapeutique.

Disons encore quelques mots du résultat que vous pouvez légitimement attendre. Une psychanalyse doit produire un savoir sur ce qui gouverne le sujet, c’est-à-dire sur ce qui semble présider à son destin et qui cause ses maux. Pour reprendre l’image de Freud, elle doit procéder à l’épluchage des couches de significations entourant le noyau jusqu’à s’approcher de ce noyau: le savoir de l’inconscient, ou la vérité cachée (insue) du sujet. La vérité du sujet concerne, en dernier ressort, son désir, à savoir les forces vitales qui animent ce sujet et ont la puissance de le guérir comme de l’élancer, le relier, l’accomplir.

L’échec thérapeutique, dont on peut toujours extraire un savoir sur ce qui l’a produit, devient partie du chemin si l’on choisit de ne pas renoncer à guérir. Il appartient au psychanalyste de sans cesse s’interroger et travailler pour tendre à une position toujours plus humaine et plus juste, à un acte toujours plus efficace. De même, il est toujours offert au patient de ne pas perdre espoir, pour essayer encore, essayer mieux. Jusqu’à la rencontre propice, d’abord avec un psychanalyste, puis au-delà, avec lui-même.

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