Ekher prova (ou Dernière répétition) est une comédie noire qui met en scène une actrice seule sur les planches. Dans ce monodrame, l’actrice se déchaîne en costumes, en parole et en musique, fuyant d’un drame émotionnel à l’autre. Son but? Mener à terme sa pièce. Son interlocuteur? Lui. Son homme. Absent. Pourvu qu’il lui réponde. Pourvu qu’il lui fasse écho. Maria Douaihy, docteure en études théâtrales, enseignante de théâtre à l’Université libanaise, auteure et actrice, écrit et joue son propre texte. La pièce est mise en scène par Shady Habr. Ekher Prova se joue au théâtre Monnot, du 12 au 22 janvier 2023.

Est-ce qu’un "je t’aime" suffit pour achever toutes les scènes de la vie? Et lui, cet homme absent, la connaît-il seulement pour l’aimer? "Je suis une femme… Une femme est une femme", clame l’actrice.

Une femme hystérique, une femme déchaînée, une femme auteure, une femme chanteuse d’opéra, une femme sans censure. Une femme aux mille facettes. Une femme à moitié femme, parce qu’elle aime… et quand on aime, une moitié de soi est ravagée, habitée par l’autre. Elle est une femme qui sourit quand elle le voit, lui. Qui?… Lui, le metteur en scène? Lui, son mari? Lui. Cela suffit.

"Ce n’est pas évident de rester longtemps dans les coulisses alors que je connais mon potentiel", dit Maria Douaihy. Elle affirme en toute sérénité et assertivité: "Je prends ma revanche sur la vie." De ce cheminement, de la vie, elle gagne en maturité. "Cela m’a aidée à écrire", dit-elle. Comme l’actrice sur scène, elle verbalise ses émotions: "L’important, c’est de parler. Peu importe avec qui." Que ce soit le public, le psychologue, lui ou "toi"…

"Je n’ai voulu jouer que le rôle principal", clame l’actrice sur scène. Maria Doueihy revient sur scène après vingt ans. Elle a dû faire des concessions au niveau familial et logistique. "J’ai toujours rêvé de jouer un monodrame. La dernière fois que j’ai joué à l’ACT, j’étais seule sur scène pour la pièce de diplôme de mon amie. Puis je me suis mariée et la vie a suivi son cours… Je suis remontée sur les planches, pour la première fois depuis vingt ans, l’année dernière, dans Cocktail Maison. Dans Al Aadiloun et TocToc, j’avais un rôle minime, mais c’était un passage obligé pour revenir au théâtre. Shady, m’ayant vue dans TocToc, a su que j’étais actrice. L’actorat a toujours été ma passion et j’ai toujours rêvé de jouer un monodrame." Maria Douaihy retrouve son équilibre mental et corporel. "Mes douleurs physiques se sont volatilisées. J’éprouve de la joie et j’ai hâte de connaître le retour du public." Tout comme dans la pièce, l’actrice certifie: "La dernière fois que mon cœur s’est ouvert en grand, j’étais sur scène. Je me sentais entière pour la première fois."

En ce qui concerne l’idée de la pièce et l’inspiration de l’auteur, Maria dit: "J’ai écrit ce texte depuis un an et demi, en pleine pandémie, alors qu’on était coupé du monde et seul. Je suis partie du prétexte d’une femme s’adressant à un homme qui ne lui répond pas." Sa réponse lui est essentielle afin qu’elle puisse continuer sa pièce. Elle s’invente des personnages pour remplir le vide. Cependant, il ne l’aide toujours pas dans ce schéma narratif, alors qu’il est "l’élément modificateur" qui a bouleversé sa vie. "Je tire mon inspiration de mon vécu personnel, bien entendu", dit Maria.

Quant au metteur en scène, Shady Habr, Maria a partagé avec lui son envie qu’il la mette en scène. "J’ai lu le texte que j’ai particulièrement apprécié. Il faisait écho en moi. De tels textes, légers dans leur approche, mais profonds dans leur contenu, sont passionnants du point de vue de la mise en scène", affirme-t-il. Avant d’ajouter: "Il en va de même pour la mise en scène, que ce soit pour un seul acteur ou pour différents personnages. Si le talent existe, qu’importe. J’accomplis ma besogne en toute facilité et force. Les pièces sont différentes, certes. Cependant, le théâtre demeure théâtre et la mise en scène suit le même processus. De plus, ma vision distincte en tant que metteur en scène est importante."

Quant à la construction du personnage, il atteste: "On a travaillé le personnage selon différents critères. Le premier axe est basé sur son anxiété et sur tout ce qu’elle veut dire à son homme. Le deuxième axe est le fait même que le personnage soit une actrice. Elle jouerait tel un personnage shakespearien ou elle userait du surjeu, dépendamment du texte. On a surtout construit un caractère hystérique, celui d’un personnage qui bascule vite d’un état à l’autre." Maria Douaihy témoigne: "Il y a sûrement une part de l’auteur dans la mise en scène. Le metteur en scène, Shady Habr, a saisi les nuances des personnages et s’est basé sur ces différences-là pour pousser les choses à l’extrême. Sa lecture du texte a été rapide et intelligente. Les voix, les personnages, l’éclairage et l’ambiance changent avec chaque personnage."

Marie-Christine Tayah

Instagram : @mariechristine.tayah

 

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